La question de la violence conjugale
La violence conjugale est très particulière ; d’abord, elle ne surgit pas par hasard, elle implique l’usage de la force et de la menace. Le geste violent est une stratégie qui vise une fin. Il constitue un abus de pouvoir au niveau des intentions poursuivies (contrôler, dominer, insulter, menacer, gifler, tuer…).
Elle consiste à intimider une personne par des menaces. Les violences verbales réfèrent plus au débit de paroles, à la violence perçue dans la voix et les cris, c’est-à-dire au mode de communication. La violence verbale peut se traduire par des interdictions, du chantage, des ordres.
La violence psychologique
Toute action qui porte atteinte ou qui essaie de porter atteinte à l’intégrité psychique ou mentale de l’autre (estime de soi, confiance en soi, identité personnelle) sera qualifiée de violence psychologique. Souvent subtile, cette forme de violence est difficile à identifier, pourtant elle atteint d’autant plus les femmes qu’elle s’attaque à leur image. En effet, elles sont conditionnées à définir leurs valeurs personnelles à travers le regard des autres (en particulier celui des hommes).
La violence verbale et la violence psychologique jouent principalement sur la peur et la dégradation de l’image de soi, elles sont très destructives et conduisent à l’anéantissement progressif des désirs et de la volonté des femmes qui doivent céder la place aux exigences de l’homme tout-puissant SOUFFRON K., Les violences conjugales, Éd. Milan, Essentiels…
Ces deux formes de violence permettent à l’agresseur, sans porter aucun coup, d’atteindre le but recherché : créer une tension insupportable pour sa conjointe, maintenir un climat de peur et d’insécurité, atmosphère propice pour inciter l’autre à se conformer aux exigences de son partenaire par terreur de voir la situation s’aggraver davantage. Selon les études de chercheurs nord-améri-cains, les violences psychologiques et verbales sont encore plus dévastatrices sur le plan personnel que les violences physiques.
L’explosion de la violence
Les femmes maltraitées décrivent souvent leurs maris comme des individus sujets à des crises ; leur fureur paraît disproportionnée par rapport au « déclencheur » comme si leur vie était menacée. La crise éclate quand l’individu a la sensation que son identité est minée.
L’homme violent traverse une phase d’altération, un état dissocié dans lequel son esprit semble se séparer de son corps; la conscience s’altère, les contraintes sociales tombent et une accumulation en spirale débouche sur l’agression.
Aux prises avec la violence de son conjoint, la victime comprend très vite qu’il ne sert à rien de s’échapper; elle apprend à se dissocier de son corps. Après les coups, les réactions de la victime sont celles des personnes touchées par une catastrophe naturelle : effondrement psychologique pendant un ou deux jours, suivi de symptômes d’angoisse « post-traumatique » comme l’apathie, la dépression, et un sentiment d’impuissance. Par la suite, les victimes ont tendance à s’isoler quelque temps pour laisser se cicatriser leurs blessures physiques et mentales et éviter la honte de se montrer défigurées à des amis.
La phase des remords
La phase de remords intervient une fois que la violence a éclaté et que la tension s’est dissipée. Cette étape peut entraîner toute une gamme de comportements, depuis la négation pure et simple de ce qui s’est passé, jusqu’à des remords et des promesses d’amendement. Souvent les hommes sujets à ce genre de cycles font pression sur leur entourage (y compris les enfants) pour plaider leur cause; ils comptent sur le sentiment de culpabilité de leur femme et la présentent comme leur seul espoir. Sans elle, la vie serait réduite à néant; ils adoptent un comportement infantile. Ils se convainquent et persuadent les autres que les actes de brutalité vont cesser. « La phase de remords ne dure pas éternellement, elle touche à sa fin dés que l’homme est repris par son angoisse, son sentiment de vulnérabilité qui annonce le retour imminent d’une violence.
C’est parce que la violence agit comme un cercle vicieux qu’il est extrêmement difficile d’en sortir. Il ne faut pas croire que les femmes violentées restent parce qu’elles aiment être battues et humiliées ou parce qu’elles sont indifférentes. C’est au regard de toute cette complexité que peut se comprendre l’attitude parfois incertaine, contradictoire, des femmes victimes de violences conjugales.